On vit dans un monde où la terreur règne. Le chaos est omniprésent et plus aucune règle n’est respectée, sauf une : il faut achever les missions. Pour ce faire, les gens sont regroupés par trois et emmenés dans un dortoir en attendant leur première mission. Une fois la celle-ci effectuée, ils sont livrés à eux-mêmes pour survivre. S’ils reviennent. En effet, les missions consistent en un affrontement de deux groupes de trois, et chacune des équipes doit tuer l’autre. Si on tue ses adversaires, on a gagné la mission ; si on meurt, on a perdu. Quand la mission débute, il y a donc toujours le risque et la peur de ne pas revenir.
Mais plus le temps d’en parler, la mission a commencé. Et je dois survivre.
« Allez tire ! On n’attend plus que toi !». Ce sont les cris que j’entendais par dessus mon épaule, tétanisé par la peur. J’étais le seul, le dernier à être encore là. J’avais mon pistolet à la main, pointé sur mon adversaire. Robin et Sacha, derrière moi, me poussaient à tirer. J’ai fini par craquer et j’ai appuyé sur la détente. J’ai d’abord senti la puissance de la détonation, puis j’ai vu la balle frapper le corps de mon adversaire. Je me suis retourné, et j’ai rejoint tant bien que mal mes compagnons car je tremblais et je ne marchais difficilement. On est monté dans la voiture pour rejoindre notre dortoir et essayer de continuer notre vie, comme si de rien n’était. En rentrant, je me suis couché sur mon lit et j’ai repensé au corps qui s’écroule en face de moi, à ces yeux remplis de vide. J’ai réalisé à quel point j’avais de la chance d’être encore en vie et d’être bien accompagné. De Sacha, tout d’abord, qui est très grand et qui connaît beaucoup de chose en informatique. Il a des petites lunettes rondes et porte toujours des écouteurs, mais jamais dans ses oreilles ; de Robin, ensuite, le casse-cou et les muscles de l’équipe. Il ne réfléchit pas beaucoup, mais il est très utile quand il s’agit de frapper fort. Sa particularité est qu’il n’a plus qu’un œil car il à été transpercé par une balle dans les missions qu’il a effectuées avant qu’on se rejoigne tous. Moi, je suis le cerveau de l’équipe. Je connais bien l’être humain et les stratégies à pour réussir à l’embrouiller et le manipuler. Heureusement que nous avons cette équipe, car ça nous aide beaucoup pour les missions.
Je suis retourné près d’eux et on a discuté de ce qu’on a fait aujourd’hui. C’est dure de se dire qu’on a ôté la vie de plusieurs personnes, mais on arrive toujours à la même conclusion : on n’a pas le choix si on veut survivre. C’est soit eux, soit nous. Il faut qu’on continue notre chemin si on veut être heureux.
Notre prochaine mission est un nouveau duel. On va de nouveau devoir abattre des personnes qui ont le même objectif que nous. Je ne compte plus les personnes qu’on a tuées car, avant d’arriver ici, on a dû faire bien pire. Je ne sais pas quand ça se finira, mais j’espère au plus vite car je n’arrive plus à retirer des vies à des gens que je ne connais pas et qui ne m’ont rien fait. Je me reconnais à peine. Il était déjà tard quand je suis retourné dans mon lit pour dormir et, alors que je me glissais sous les draps, j’ai entendu robin crier. Hurler. Je n’avais jamais entendu un cri aussi strident de ma vie, surtout venant de lui, le gros dur de l’équipe. On est arrivé près de son lit avec Sacha et, là, on s’est tous les deux regardés. Sacha était devenu tout blanc. Robin se vidait de son sang par tous les orifices. Ça giclait partout. J’ai essayé de boucher les trous avec des draps et du papier, mais il avait déjà perdu trop de sang. D’un coup, le silence s’est abattu sur la pièce : plus de cris, plus de pleurs : il était mort, exsangue. Sacha s’est mis à pleurer et à insulter la vie de merde dans laquelle on était. Il était pris par la colère et la tristesse, passait de l’un à l’autre. Je l’ai pris dans mes bars et je l’ai apaisé avec en quelques mots : « on va finir toutes nos missions et aller jusqu’au bout pour lui, on va faire qu’il voit de là-haut qu’on pense à lui en se battant. Ce sera une motivation en plus pour nous. Calmés et déterminés, on est alors partis dormir, malgré ce qui venait de se passer. Le lendemain, on s’est tous les deux réveillé avec une très grande motivation. On est parti pour notre mission en ayant en tête Robin pour qui on va se battre. Arrivé sur les lieux, on a vu qu’on allait devoir se battre à l’endroit dont robin nous parlait tout le temps car c’était son endroit préféré. La motivation et la rage sont alors montées encore plus et Sacha m’a dit : « on se doit de tout détruire pour lui ». On s’est mis en place pour la mission et on a remarqué que seul deux adversaires étaient en face de nous, alors que d’habitude il y en a toujours trois par équipe. Sans doute avaient-ils aussi perdu leur coéquipier en cours de route, comme nous avons perdu Robin.
On s’est vite reconcentré sur notre mission : survivre. Et on a eu raison. On est arrivé à éliminer nos deux opposants sans se faire toucher, malgré l’absence de notre meilleur combattant, Robin. Heureux d’être toujours en vie, on a commencé à célébrer notre nouvelle victoire. Mais, après quelques minutes après, Sacha s’est immobilisé et m’a fait remarquer quelque chose : « C’est bizarre, d’habitude la partie se termine quand on a tué tout le monde. Et là, il n’y a toujours pas d’annonce. ». Au même moment, une détonation se fait entendre. Je me suis retourné vers Sacha pour lui demander ce qu’il pensait de la situation, mais je la détresse dans son regard rendit toute parole inutile. Une tache rouge commençait à se former sur son torse et il est tombe sur le sol, sans pouvoir prononcer un seul mot. Je vis alors, derrière lui, au loin, une personne, fusil à la main, qui partait se cacher derrière une carcasse de voiture. J’ai alors instantanément compris : la partie ne s’est pas fini après la mort de nos deux adversaires, car ils n’étaient pas deux mais trois, et l’un d’entre eux était resté caché pour nous surprendre. Je sprintai alors vers lui pour l’éliminer. Il me canarda, mais ses balles passèrent toutes à côté de moi. Me sentant en veine, j’ai alors pris le temps de l’ajuster. Je l’ai abattu d’une balle en pleine tête. Je me suis ensuite rapproché, et j’ai vidé ma colère, ma tristesse et mon chargeur dans son crâne qui finit par exploser en plein de morceaux.
Les larmes ont alors commencé à couler, et j’ai couru vers le corps de Sacha pour essayer de le sauver, mais il était trop tard. Je l’avais perdu, lui aussi.
Je me suis relevé, pistolet dans la main gauche et le poing droit serré. Beaucoup de chose me sont passées par la tête, mais ce qui me hantait le plus, c’était les images de Robin et de Sacha en train de mourir sans que je puisse faire quoi que ce soit. Toutes ces pensées noires ont commencé à me ronger de l’intérieur et je n’en pu plus. Je n’arrivais plus à tenir. J’ai pris le glock dans ma main droite et l’ai mis sur ma tempe. Et j’ai appuyé une dernière fois sur la détente. Rien.
J’étais toujours en vie. J’étais tellement perturbé par toutes les choses qui s’étaient passées, que j’avais oublié que j’avais vidé mon chargeur dans l’homme qui avait tué Sacha et que donc je n’ai plus du tout de balle.
Je me suis alors écroulé par terre et je suis resté là, immobile, seul, dans la boue, les mains tremblantes, les yeux totalement vide et me demandant ce que j’allais faire. D’un coup, une lumière s’est allumé au loin et me faisait mal aux yeux. Comme je n’avais plus rien à perdre, je me suis avancé lentement vers la lumière qui sortait d’une porte. Que j’ai passée. Derrière, tout était blanc si lumineux que je ne distinguais rien du tout. Au fur et à mesure que mes yeux s’habituaient, j’ai pu lire le message sur le mur en face de moi. Il disait simplement : « Bravo, tu as gagné. » Dans ma tête c’était l’incompréhension. Etais-je allé jusqu’au bout de toutes les missions ? Etais-je le seul survivant de tout ça ?
J’ai alors aperçu une silhouette qui se rapprochait de moi ; plus elle se rapprochait plus j’avais l’impression de la connaître. Puis d’un coup, tout devint noir. Le vide absolu.
Puis, faiblement, j’ai entendu des voix se rapprocher. Une lumière s’est allumée et je réussis à ouvrir les yeux. Autour de moi, une salle remplies de médecins et de machines que je ne connaissais pas. Derrière ces machines, une porte s’est ouverte et la fameuse silhouette que j’avais vue avant de me retrouver dans cette pièce s’avançait vers moi. J’ai essayé de me relever pour mieux voir de qui il s’agissait, mais j’étais sanglé sur mon lit. La personne continuait de se rapprocher, puis est venue se mettre à côté de moi. Il m’a fallu un peu de temps pour la reconnaître, mais je n’eus très vite plus aucun doute. C’était, c’est Lark Kuterberg. Il m’a regardé puis a retiré une puce qui était fichée sur ma tempe gauche. Son regard s’est fiché dans le mien et il m’a dit : « Bravo, tu as réussi l’épreuve imposée par le Métaverse, tu peux intégrer notre société ».
J’ai alors compris que les choses que j’avais vécues n’étaient que des illusions et des images imposées à mon cerveau. Que les émotions que j’ai vécues étaient programmées. Rien n’avait été vrai. « Comme tu le comprends, » me dit-il « nous sommes dans un monde où le Métaverse a pris le dessus et est le maitre du monde. Nous testons les gens pour voir s’ils sont capables de survivre dans notre monde. Le virtuel est devenu la réalité pour la majorité, mais je t’offre la possibilité de me rejoindre pour m’aider à la contrôler ».
Le vide. C’était le vide absolu dans ma tête. Je ne comprenais rien. Il me fallut quelques minutes pour que mon cerveau se remette en marche. Je ne pouvais bien évidemment pas rester dans le noir, l’ignorance ni me contenter du virtuel. Je voulais vivre, et connaitre la lumière.
J’ai donc décidé de rejoindre Méta, pour survivre. Une fois de plus.